dimanche 22 novembre 2009

Le temps des fleurs

À dix-huit ans, Hélène banque pour le bac. Elle termine en terminale littéraire. Elle a choisi la voix de la facilité. Elle aura sa moyenne. Facile de prêcher le bac en 2000 : suffit de pêcher par à-culs. Hélène se fout du bac comme de son eau. Elle est belle comme un ange. Ce qui l’intéresse, c’est la drague. Pas la drogue. Elle n’a jamais eu de mal à se taper des mecs, puisque les dragueurs la matent. Quand ils ne la cavalent pas, les intimes s’intimident. Hélène est irrésistible. Elle métisse, elle de haute taille, elle a les yeux luisants, le sourire narquois.
Son père sénégalise les tarés. Le franc-tireur passe son temps à picoler et à se battre. Un vieux fou. Sa mère la brave en bave comme elle peut. Secrétaire battue. Elle a divorcé, elle a loué un appartement. Hélène a une sœur, plus jeune. Hélène fait comme il lui plaît. En ce moment, elle sort trois gars différents. C’est son trip, la polyandrie. Pour la galerie, devant les copains de classe, elle s’affiche avec un footeux stagiaire à l’A.S. Eonville, le club pro de la ville.
Un bête frimeur. Un mouton ne comprend rien. Le bêlant vient du Dahomey. Il mâche des chewing-gums, il joue son numéro dans les nattes. Les filles tombent, Hélène s’est décidée. Elle le méprise. Elle couche de temps en temps, c’est pour faire la femme. À dix-huit ans, on pose. On a la vie devant soi. Les problèmes sont des jeux. En ce moment, Hélène dans le bus s’apprête à rejoindre le chéri. Elle tient sa vie dérangée, comme les adultes : du mec, du fric, de l’indépendance.
Hélène est dose des vêtements. Elle joue la branchée, jeans, treillis, style rap reggae. Elle répète qu’elle est africaine. Une afro aussi canon, ça court pas les rues. Elle descend du bus. Quatre heures de baratins, elle est belle. Plus que rebelle. De la philo, des maths – de la ouate. Rien à cirer du charabia pour se la ouèj. Aux études, le footeux n’y comprend goutte, alors elle donne dans sa spécialité : les racailles qui dealent. Si t’es rude boy black, tu intéresses Hélène.
Le footeux black ne durera pas. Elle pense déjà à le plaquer. Black-lister. C’est son grand jeu de post-adette qui adule le pouvoir des Narcissette sans couette. Les gaillards matent, elle – savate. Faut pas charrier. Un footeux, c’est pour la fête, après ça prend la tête. Hélène a d’autres goûts. Ceux qui ressemblent à son père, des Noirs exclusifs, des méchants exclus, des sulfureux esclavagisés.
Le thème Hélène, c’est la vie. Hélène l’Africaine n’est pas de France. Pas question de perdre son temps avec les craies. Elle tape son caprice : poser un pont à son lapin. Elle lui a filé rencard dans un bar du centre, un coin pour flippés à flippers. La mode des portables n’a pas sonné. Le footeux crisera, le Négro virera vert quand elle l’assaisonnera sauce piquante : elle ne veut plus le voir. Là, tout de suite, elle n’a qu’une envie : rejoindre son dealer de choc. En privé, elle conserve au chaud un petit étudiant qui ressemble à s’y méprendre à un chanteur du bled, qu’elle auditionne en vacances.
Le tout, c’est de manipuler les mecs. Qui est le mac ? Chacun tient sa reine. Chacun son arène. C’est du vice de haute volée. C’est enseigné dans les chansons r&b new wave. C’est de la triple vie. La triple pression : Hélène les rend dingues. Hélène chavire les cœurs. Le dealer tient sa perle. Elle montrera sa garcitude. Dans sa tête, demain, c’est foin. Elle ne voit que le plaisir. Elle croque. Elle craque. Elle se casera quand elle aura des gosses. Elle n’y pense pas, cette seconde vie. Sa peau première, c’est la ville, les mecs, les cœurs. Le bourreau des bourrelets. Elle ne fume pas, sauf les têtes. Le shit, c’est son casse.
Le cul est l’instrument du pouvoir. C’est moins vicelard que la came. Les trafiquants, elle s’en méfie. Elle veut de l’ivresse, pas des balles. Les dealers l’excitent. C’est le côté transgressif. On refuse les lois, on nique la police, on baise le système. Quand on passe le bac et qu’on se vit en banlieue, le dealer, c’est le pied. C’est l’étalon-or. Le grand méchant doux.
Hélène pleure sans portable. Les bourges en ont. Sa fierté est son fond de commerce – la pauvreté. Son père est fauché, sa mère est fâchée. Hélène s’en sort et ses aveux accroissent sa beauté. Elle brille. Elle sort du bus. Elle prend un tram. Deal entériné, elle visite son dealer. Il baise comme le big deal. Il trinque au champagne. Il cache sa tanière. Il pirate son repaire. Elle kiffe ce mode où un sous-traitant du business local la maltraite. Son vice, Hélène, elle marche à perdre haleine. Elle se marre comme une baleine. Elle profite de la vue à pleines dents. Elle bouffe des calories, c’est bon pour sa ligne.

Hélène a trente ans. Elle a fêté son anniversaire. Ses parents se sont réconciliés pour leur cimetière. Hélène a enterré les petits plats dans les grands. Elle s’enferme en boîte. Elle laisse à sa mère son gosse. Un quarteron pour les puristes. Le père est Malien. Il s’est barré l’année dernière sur un coup de bête. Il gueulait tout le temps. Hélène a cheminé. Elle est blindée. Les mecs la saoulent. Elle fait dans le Black, mais c’est méfiance. Elle est dégoûtée. Elle renie sa statue. Elle a cadré le tableau : une raie entourée de poissons-chats.
Pas facile de sortir du pétrin sans levure. La célibatarde est retournée chez ses parents. Trop de galère, top de tristesse. Elle n’arrive plus à assumer. Le job de sexytaire, c’est nul. Même haut de gamme, le trilinguisme à talons précarise. La vérité des patrons aboie. Hélène veut voir son gosse. Depuis sa solitude, elle a pris des kilos. Elle incrimine la taille maternelle. Son père a le cerveau de l’alcoolisme à bastons. Ses parents scotchent sans sky. Ils culpabilisent de leur trajectoire. Une ratée après tant de beauté, quelque part, c’est la faute à – qui ? Hélène avait tout pour s’en tirer. Tous les atours. Résultats des courses : elle passe sa vie à se faire tirer.
Avec son Malien, elle s’était calmée. Elle jouait la casée. Elle faisait Mumuse. Elle a bavé. Elle s’est rangée. Elle a galéré. Elle a enchaîné. Elle a tripé. Trois ans de bagne avec un dealer mauritanien qui castagne. C’était pas la cocagne. Il tapait, il buvait, il fumait – le zoulou digne de son père. Les cinq ans qui ont suivi, elle s’est disjonctée dans le sexe. Elle a cassé. Elle a signé pour du provisoire. Ça s’est arrêté. Ce soir, la sœur de l’ex l’accompagne. Hélène est restée en bons termes avec la paumée. Une mère qui abaisse ses gosses. Quand elle était jeune, c’était la pute du quartier. Elle a passé sa jeunesse à biaiser, boire et fumer.
Selon son frère, l’honneur familial nécessitait le recours aux méthodes du bled. « La loi française s’arête à ma porte ! », clamait-il, fier de sa formule qui upercute. Personne n’osait le contredire, puisqu’il déposait la black culture. La jeunesse qui fume des joints est si stupide. Hélène s’est soignée de ses fréquentations en couchant sur un coup de joint. La sœur de l’ex a le bon goût de gerber son frère. Elle n’a pas oublié sa violence. Pour se remettre de son spleen d’Africaine réfugiée politique, elle gobait. Elle vidait des bouteilles. Le père de son premier, elle a zappé. Elle a beaucoup oublié. C’est sa manière de fonctionner. D’exister. De respirer. Hélène se perd avec la paumée. Cette renée camoufle la beaufitude dans l’ébène d’origine. Hélène est bof, l’alcool la tire de la médiocrité. Pour ne pas geindre, elle gin. Sans jean, elle picole son attrait. La fête n’est plus folle.
Hélène a beau savoir ce qui l’attend, les Blacks lourdingues qui dragouillent, les dealers qui relucrent, les sportifs qui sautent, elle est de ce monde. Elle aime son monde. Elle kiffe sa faune. Elle quitte sa faute. Elle n’est jamais quitte de la foire. Elle n’a pas les moyens. C’est une mouche scotchée à son ruban. Elle bat des ailes. Elle fatigue vite. Elle assagit. La tristesse coince. Elle rêve d’une autre vie – un autre départ. Elle a grillé le joker. Elle a flambé son jeu. Personne ne l’aidera. Le plaisir est consommé. Le sexe est fini. Place à la vie. Rien ne va plus. L’idéal du passé ne reste plus prévisible.
Tout est stéréotypé. Tout est blafard. Entre gris clair et gris forcé. Les Sénégalais sont une bouée. Elle est dégoûtée des menteurs et des mauvais aryens. Les malpropres qui font les beaux n’ont rien dans le fute. Ce soir, Hélène repartira avec un gaillard. C’est sa manière de lutter contre la vieillesse. Vivre comme si elle avait dix-huit ans. À quinze, elle jouait à la femme. A trente, elle pose en jeunette. C’est game ovaire, Hélène le sait. Elle clopera, elle claquemurera son HLM, elle ratera l’éducation de son fiston, elle sautera de mec en mac.
Hélène est antique. Quand on joue les Cendrillon, on finit en cendres. Quand on fane, on ne fleurit pas. Hélène était une fleur, elle a joué avec les cœurs. Hélène était une rose, elle morfond dans le morose. Hélène est pleine d’épines. Au départ, les épines piquent les prétendants. Les épines se sont retournées contre l’arrosée. Notre fleur a commencé par scintiller, maintenant, elle est rossée. La rosée ne dure qu’un temps. Après le temps des fleurs, c’est la saison des leurres. Quelle heure ?

Hélène rayonne. Elle monte dans la BM. On fait la sortie d’une boîte de nuit black. Hélène est la reine de soirée. Les danseurs la reluquaient. Les sapeurs tombaient. Une métisse à Blacks, les Blacks aboulent. Allez savoir. La star se tourne des films. File dans ta boîte ! Hélène sourit. Elle a fait son numéro. Elle charme. Les mecs la courent, les filles jalousent. C’est ce qu’elle veut.
Heureusement qu’elle flashe, c’est son atout. Elle la joue célibataire à mort. La femme exige les mêmes droits que les mecs. Elle est féministe. Elle est libre. Elle est l’hydre. Elle couche avec qui elle veut. Elle branche comme elle veut. Son truc est en friche. L’Afrique des banlieues. L’Afrique des racailles. L’Afrique des paumés – le cul entre deux chaises. De temps en temps, elle retourne dans son beau pays.
Là, c’est un dealer. Elle a cassé avec un dealer. Elle a repéré les dealers qui l’intéressaient. Elle privilégie les Parisiens. Hélène a les moyens d’être croqueuse. Elle est africaine. Ce soir, elle contacte la puissance. Vingt-cinq ans, la vie à pleines dents. Ce qui la fait tourner, c’est les mecs. Avoir l’air d’être fatal. Les dealers sont des joujous. Ses toutous. Ses froufrous. Hélène déteste les macs. Elle tombe pour la puissance. Elle a passé le cap. Elle était avec un psychopathe, un dealer mauritanien qui a manqué de la buter à la dernière anicroche.
Un malade. Elle avait pitié de sa détresse. De son stress. Elle l’a protégé tant qu’elle a pu. C’est bon pour la réputation. On est fidèle. Elle l’a jeté quand elle a su. Elle a louvoyé. Elle a tergiversé qu’il s’accroche. Il chuchotait. Ils ont souffert. Elle l’a trompé. Il l’a tapée. Elle s’est sauvée. Quand elle n’est pas avec lui, elle profite du vice. Elle enchaîne. Tout ce qui est noir est son miroir. Elle est princesse underground. Impératrice de soirée. Hélène est cramoisie. Elle brûle, elle grille, ses ailes s’éteignent.
Le dealer est des Antilles. Hélène ne blâme pas l’origine. Elle est tolérante.
La différence entre les Antillais et les Africains la défrise. Tant qu’ils sont noirs, ils sont de couleur. Le dealer est baraqué, frimeur, boxeur. Il a rasé le crâne comme les vrais. Elle a l’habitude de tourner avec lui. En général, ils sont raccords : il offre le champagne dans son coffre, elle piccole deux coupes, ils baisent sur un parking. Dans ces moments, elle ne pense à rien. Elle est bien. Hélène a trop souffert. Elle a besoin d’évasion. C’est sa rédemption. Sa prison. Son anxiolytique. Elle est accroc. Ça commence à filtrer. Ça parle. Sa mère pleure dans la cuisine. Sa sœur est gênée, fière d’être la réussite. Hélène se fout de l’incompréhension. Elle règne sur son monde parallèle – c’est grisant.
Elle ne sait pas pourquoi. Elle a cessé de penser. Le dealer conduit. Il roule à toute vitesse. Il n’a pas mis sa ceinture. Elle est en Afrique. Il peut la tringler dans tous les sens, elle est au-dessus. Elle plane. Elle est supérieure. Elle maîtrise le sexe. Elle a son style. Elle est d’un genre. Elle oublie les à-coups. Elle vogue dans le vague. Elle vit du vit. Elle vide son désir.
« On va chez oim ? »
Quand il parle en verlan, il a l’air à fond dedans. Elle a un coup dans le nez. Elle hurle de frime. Elle est raggafine. Elle entretient ses fesses d’Africaine – sa minceur calibrée. Pour suivre les canons de la beauté afro, il importe de ménager les rondeurs, de réfuter la mannequin camée et anorexique, de louer les hanches pêchues.
« Yes ! »
Elle a de grands ongles, des doigts fins, de longues mains. C’est le carnaval. Il débloque dans son bloc. Elle est à bloc. Elle a pitié. Le Mauritanien la suit. Il est aux orties. Alors pourquoi ? Elle reprend une coupe. Avant de baiser, elle exige sa dose. Les bulles, c’est de la balle. Quand elle sort, c’est d’elle-même. Ils émergent de la voiture. Il est fou. Il essaye de la prendre dans l’ascenseur. Elle résiste. Elle décide. Il décode. Elle est en sueur. Une lueur : ils sont arrivés. La porte s’ouvre. Hélène sourit. Elle a l’avis. Elle est indépendante. Le dealer tombe. Il n’a pas crié. Le Mauritanien était planqué dans le placard. Il a suivi. Il est accroc. Il disjoncte.
Il a une batte. Il est une bête. Il est mauvais. Il est mauve-haine. Il ne dit maux. Il ne bave pas. Il est immobile. Hélène va mûrir. Hélène va mourir. Hélène veut crever. C’est de la perte de temps. Il l’empoigne et la jette contre le mur. Elle crie du plus fort. Son Antillais s’est relevé. Il va la défendre. Il se sauve. Pas KO, le boxé. Il tient à son box. Si elle en réchappe, elle le giflera. Ce fils de chien est un lâche. Elle préfère les psychopathes aux psychoputes. Elle comprend pourquoi son père déteste les Antillais. Pourquoi les Africains ne sont pas des îles. Le Mauritanien la jette contre la porte. Même pas mal. Même pas peur. La cerise a l’habitude des crises. Son père crissait. Le Mauritanien trisse.
Hélène sort de son corps. C’est trop fort. Le Mauritanien la traîne par les cheveux. Ses tresses cassent. Le Mauritanien veut la balancer par la fenêtre. C’est le châtiment pour les salopes. C’est ce qu’il gueule. Il a la rage. Il est défoncé. Il a pris une ligne pour atteindre un état pareil.
« Chienne ! »
Quand on tombe, on n’a pas le temps de vider. Hélène est morte comme une reine. Elle part dans la fleur de l’âge. Elle avait peur de vieillir. Son fils n’aura pas le temps de se révolter. Hélène n’a pas aimé sa chute. Elle a croqué l’envie. Elle a craqué. Elle a traîné des crackés. Des détraqués. Elle le paye. Dealer, l’addition. Quelle heure ? Une ligne de foudre. Hélène s’évade. Le bitume par terre, c’est la misère.
Le Mauritanien gémit. Le Mauritanien est KO. Hélène est libre. Le dealer-boxeur est revenu. Hélène suffoque. Elle avait fait ses prières. Elle se retrouve à terre. C’est dur, le retour à la vie.
« Ça va ? »
L’Antillais est moins fou. Le Mauritanien est malade. L’Antillais est en chien. Il tient une planche. Pendant que le Mauritanien défenestrait l’ex-voto, l’Antillais a assommé le topo. Hélène encaisse mal. Le Mauritanien lui défend le cœur. Il est démuni. Il est dramatique. Une ligne dans la rubrique faits divers de la feuille de choux locale. L’éconduit défenestre sa concubine. Beaucoup d’hémoglobine. Hélène a envie du Mauritanien. L’Antillais est un bal trip. Il a sauvé ses tripes. Elle le quitte. Elle double. L’Antillais est un frein. Avant de le virer, elle veut en profiter. Il est musclé.
« Qu’est-ce qu’on fait ? »
L’Antillais plastronne.
« Je le jette ? »
Il joue les chauds mais il est froid.
« Laisse-le. Il est mal. Je vais appeler ses potes. Ils vont le récupérer. »
Quand on traîne avec les dealers, les policiers, on zappe. Ce sont les ennemis. Les menaces. Pas question de recourir aux keufs. On fucke les flics. On se débrouille entre soi. On appelle sa bande. Le Mauritanien deale en gang. Hélène a pitié du bang. Ruda lex, sed l’ex. Les bons sentiments apitoient. Elle larmoie. Elle ne veut plus baiser. Elle a peur de l’envie. Elle a oublié l’agression. Elle a une idée en terre.
« Tu sais ce que je vais faire ? »
L’Antillais secoue la tête.
« Je vais le ramener à la raison… »
Elle voulait dire maison.
- Chez lui ? »
L’Antillais hallucine. L’Antillais croule sous les femmes. Comme tous les dealers, il est demandé. Il est à succès. Il est déçu. Hélène entretient une réputation de chaudasse. Se taper Hélène, c’est apporter la preuve qu’on est bankable. On assure grave. On est à la mode. Hélène, tu lui offres une coupe et tu la tronches. Hélène, elle joue aux mecs. Elle se la raconte viril. Dans dix ans, elle sera usée. Elle ne vaudra plus un clou. En attendant, elle est la salope rusée. La salope sacrée. Elle est bonne, elle est bandante, elle est bingo. L’Antillais a compris qu’Hélène veut jouer. Elle n’est pas sérieuse. Tant que c’était pour la bourre, l’Antillais signait. Maintenant que c’est pour un soin, l’Antillais démissionne. Sa mission est de profiter des seins. Pas de sauver les psychopathes de leur destin de geôle. Si Hélène veut réhabiliter le Mauritanien, qu’elle saute par la fenêtre. L’Antillais hausse les épaules.
« Je rappelle ce soir. »
Hélène est en instance de départ. Son plan est charmant. Une copine arrive. Elles vont attendre le réveil de l’excité en loques. Elles vont le rafistoler. Si ça se trouve, Hélène trouvera le moyen de se rabibocher avec celui qui a essayé de la trucider. Hélène a beau chérir la violence, faut pas charrier. Elle est sonnée. Elle est cinglée. Baiser jusqu’à la mort, c’est son zénith. L’Antillais opine. Ne pas faire d’histoires, surtout quand on est dans le biz.
« Je repasse tout à l’heure… »
L’Antillais sourit. Il a rencard avec son officielle vers midi. Une infirmière qui est aux petits soins avec son grand mataf. Pour un Antillais, une Blanche, c’est l’objectif. Les Blancs ont déporté les Noirs et les ont dominés. Peut-être que dans cinq siècles, les Noirs reprendront le dessus, mais en attendant, les Blancs sont à la castagne. L’Antillais n’a pas le temps d’attendre. Il fonce.
« Je te laisse les clés. Je ne vais pas rester avec ce malade à attendre qu’il se réveille… »
L’Antillais se barre. Il est à l’aise dans la posture de l’éternel déménageur en stand-by. Tant qu’il ne sera pas proprio de la belle maison dans la prairie, il n’est nulle part chez lui. Il se fout des locations, il se branle des HLM, il se moque de tout. Il méprise les bâtiments, il tartine les meufs, il nique la flicaille. Il vit à fond la caisse, en faveur des petits plaisirs. Il nique le système parce que le système le kène. Il est individualiste à mort dans un système individualiste de mort. Quand le système tombera, l’Antillais sombrera. Si l’Antillais était reconnu, ce serait le pire des enfoirés. Il en est fier.

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